Au bout du bout du monde

Dans les cinquantièmes hurlants, à 100 miles à l'est du Cap Horn, au bout de la terre de feu, l'île des États longue de 65 km émerge d'un océan de vagues et de la grande houle Antarctique.
Découverte en 1616 par messieurs Shouten et Lemaire, venant des Etats de Hollande et qui la baptisèrent, l'île ne fut habitée que pendant une courte période.

Fin 1884, une expédition lève l'ancre de Buenos Aires pour établir une sous-préfecture, un bagne et édifier un phare, la première lumière en Patagonie et dans la zone du Cap Horn.

Les conditions climatiques épouvantables qui sévissent durant une bonne partie de l'année rendirent l'île à son abandon en 1902.

Une géographie torturée

L'île des Etats

L'île des États porte le témoignage de la dérive des continents qui morcelèrent l'écorce terrestre voila des millénaires. Dernière racine de la Cordillère des Andes, l'île offre un relief très accidenté.

La majeure partie de l'île est constituée de hautes terres rocailleuses s'élevant jusqu'à 800 mètres.
Une bande montagneuse éventrée, taraudée par de nombreux fjords axés nord-sud ou entamée par de larges baies forme l'épaule de l'île et s'étend d'une extrémité à l'autre.
Elle présente sur presque tout son parcours un relief escarpé, modelé par l'action glaciaire de la première période de l'ère quaternaire et par l'érosion maritime.
Seule la partie occidentale présente un dessin plus doux.

Environ 125 lacs parsèment l'île. Ces lacs s'échelonnent et communiquent entre eux par des rivières pour déboucher à la source des fjords.

Une île particulièrement inhospitalière

Nuages au niveau de la mer

Le climat de l'île est froid, très humide et très venté.

La moyenne des températures varie entre 0 et 5 degrés.

Les précipitations, sous forme de pluie ou de neige sont très fréquentes (25 jours par mois en moyenne), il pleut presque 4m d'eau par an sur l'île!
La neige accumulée en hiver fond totalement en été.

Le taux d'humidité et de nébulosité est très élevé. L'île peut se retrouver totalement prise dans les nuages qui descendent au niveau de la mer!

Proche du cap Horn, l'île jouit des mêmes conditions : dépressions et tempêtes se succèdent avec des vents dont la force est d'une rare violence.

Une végétation exhubérante

La végétation liée à l'humidité du climat et aux pluies réparties sur toute l'année est riche et exubérante. 

Les arbres sont maltraités par les vents violents soufflant régulièrement dans la même direction. Ils sont riquiqui et poussent à l'horizontale, en drapeau! Ceux qui tombent ne pourrissent pratiquement pas, leurs troncs blanchissent et s'accumulent dans un enchevêtrement rendant toute progression sur l'île extrêmement compliquée.

Faune

Caiquen

La faune endémique est constituée de manchots, phoques, loutres, albatros, mouettes, pétrels, canards. L'île était appelée "Terre d'abondance" par les indiens vivant en Terre de Feu. Des récits de navigateurs expliquent que les bateaux devaient réduire leur voilure pour ralentir tellement les eaux étaient peuplées!
Le plus caractéristique est le canard à vapeur qui ne vole pas mais se déplace en frappant l'eau de ses ailes .

Cara Cara Chimango

On note aussi la présence d'une faune introduite par les explorateurs, qui avaient l'habitude de transporter du bétail sur pied et d'en laisser sur les îles qu'ils croisaient, afin d'avoir une source de nourriture à leur prochain passage.
Sur l'île, on trouve ainsi des chèvres, des cerf et évidemment des rats, rescapés des innombrables naufrages qui ont eu lieu dans les parages de l'île des États.
Certaines de ces introductions ont été dramatiques car les écosystèmes insulaires sont plus fragiles que les continentaux.
Aujourd'hui, les rats et les chèvres semblent poser problème sur l'île des États.

Pendant le XlXe siècle la chasse (phoque, loutre, manchot) va dépeupler l'île.
Aujourd'hui certaines d'espèces vouées à la disparition voient leur population se reconstituer lentement.